À Téhéran, Jalal est abasourdi lorsqu’il rencontre une inconnue prénommée Bita: elle ressemble à s’y méprendre à son épouse Farzaneh. À partir d’un subtil jeu de miroirs et de substitutions, le cinéaste iranien Mani Haghighi livre un thriller doux-amer, mêlé de réalisme social, qui interroge le fondement même d’une société figée par l’impossibilité de se réaliser en dehors des dogmes.
Couple de condition modeste, Farzaneh et Jalal vivent à Téhéran. Elle est enceinte et sa santé est fragile. Il est généreux, bienveillant, et s’efforce de la soutenir. Un jour, elle le surprend avec une autre femme. Lorsqu’elle le confronte, il lui assure qu’elle a rêvé, mais il veut en avoir le cœur net et va retrouver cette inconnue. Il découvre alors qu’elle ressemble à s’y méprendre à Farzaneh. Elle s’appelle Bita et est mariée à un certain Mohsen. Parents d’un petit garçon, ces deux-là mènent une vie plus aisée. Se découvrant ainsi l’un et l’autre, les couples commencent à douter de la pertinence de leur existence.
Réalisateur de films audacieux voire déjantés comme Modest Reception ou A Dragon Arrives!, Mani Haghighi excelle à renouveler les genres cinématographiques. Dans Subtraction, il allie thriller psychologique, film noir, touches d’humour et fantastique pour interroger les fondements de la société iranienne. Partant d’une symétrie, le cinéaste se livre à un fascinant jeu de substitution entre ses personnages, avec clarté à chaque instant. Grâce à une mise en scène frontale, il les introduit dans un univers réaliste et relève le défi d’une histoire de sosies totalement vraisemblable. Son art consommé de l’ellipse renforce la puissance d’un récit basé sur le double, qui révèle l’impossibilité d’une liberté identitaire dans un système intégriste. Dans les rôles principaux, Taraneh Alidoosti et Navid Mohammadzadeh incarnent à merveille ces miroirs de soi qui bouleversent tant ils semblent otages de leur classe sociale et de leur statut de femme ou mari.
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